Saga groupe B. Episode 3 : Le Minitel du Groupe B

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La Citroën BX 4TC : un projet tellement français qu’il en devient touchant.

Qu’on nous pardonne le quasi-anachronisme du titre de l'article, mais on va bel et bien parler ici de celle qu’on pourrait surnommer le Minitel du Groupe B. La Citroën BX 4TC. Une idée brillante sur le papier, vendue avec la passion d’un ingénieur et la naïveté d’un service marketing en roue libre. Une voiture conçue pour dominer… qui n’a même pas eu le temps de faire illusion.

La BX 4TC Evolution restaurée, désormais pièce rare et prisée.

Quand un projet est managé par des techos’

Article Sport Auto n° 274 – les promesses d’une future 4x4 pleine d’espoir

Le projet BX 4TC démarre en 1983 dans le secret des bureaux d’études Citroën.À la tête du chantier, des ingénieurs maison qui veulent démontrer que leur suspension hydropneumatique peut survivre à n’importe quel terrain.L’idée : adapter la BX de route au règlement du Groupe B. Sauf que Citroën n’a ni la base, ni le moteur, ni le budget.Résultat : un 4 cylindres 2,1 L turbo hérité d’un bloc Simca, monté longitudinalement, avec un porte-à-faux avant digne d’un ferry.Guy Verrier, directeur de la compétition Citroën, voulait une “solution française” ; il aura surtout un casse-tête de 1 150 kg à mettre en travers.Même en interne, certains comprennent vite que la BX 4TC n’a rien d’une arme : “on bricolait une voiture de salon pour la guerre”, dira un mécano des essais.

"Tu sais, ce truc quand t’arrives en retard à une soirée… et que tes potes sont déjà beaucoup trop chauds"...

La BX 4TC obtient son homologation en novembre 1985, soit trois ans après l’arrivée de l’Audi Quattro et quelques mois avant la fin du Groupe B.
Le timing est absurde : Peugeot cartonne déjà avec la 205 T16, Lancia prépare la Delta S4, et Citroën débarque avec une berline haute sur pattes et 50 chevaux de moins.
La presse de l’époque parle d’un “concept intéressant, mais dépassé avant même le départ”.
Auto Hebdo note alors que “les BX ont fait illusion quelques kilomètres avant de rentrer dans l’anonymat des abandons”.
Au Monte-Carlo 1986, la voiture d’Andruet finit dans la neige. En Suède, elle arrache un 6e temps, et puis plus rien.
Trois rallyes, zéro podium. Fin de l’histoire.

L’avis des pilotes de l’époque

Jean-Claude Andruet reste diplomate : “Quand on saura exploiter son comportement, elle sera redoutable.”

Quelques mois plus tard, plus lucide : “La voiture était meilleure que ce qu’on en a dit, ou que ce qu’elle a pu montrer.”

En réalité, la BX 4TC était surtout un cauchemar à placer : sous-virage massif, moteur trop en avant, et hydropneumatique incontrôlable sur les bosses.
Même Philippe Wambergue, pilote d’essai maison, reconnaîtra plus tard :

“Elle ne freinait pas si mal, mais elle rebondissait comme une DS sur un rond-point.”

Le management appelé à la barre

Chez PSA, personne ne veut assumer.
Peugeot triomphe avec la 205 T16 ; Citroën, la marque sœur, ressemble à un boulet.
Guy Verrier défend son projet : “On avait la technologie, on n’a pas eu le temps.”
Mais le temps, justement, personne ne lui en laisse.
Après les échecs de 1986, le service compétition est démantelé, et la BX 4TC est rayée de la communication officielle.
Citroën ordonne la destruction des invendus : on parle de 114 voitures écrasées, parfois encore sous bâche.
Un ingénieur dira plus tard : “On a tué le patient pour qu’il n’y ait pas d’autopsie.”

Le carnage industriel et de fait une rareté absolue

Sur les 200 exemplaires route produits, environ 85 ont trouvé preneur.Les autres ont fini broyés.C’est aujourd’hui l’un des modèles Citroën les plus rares : il en resterait moins de 50 au monde, dont quelques-uns sauvés par des collectionneurs allemands.Le marché en a fait une curiosité : le plus gros bide du Groupe B vendu au prix d’une 911 Turbo.Même Hagerty titre : “Le plus grand échec du Groupe B vaut désormais très cher.”

Prototype exposé, symbole d’un échec devenu culte.

Le seul remède, c’est le temps, dit Orelsan

Quarante ans plus tard, la BX 4TC fascine justement parce qu’elle s’est plantée.C’est la preuve qu’à une époque où Peugeot jouait au poker, Citroën jouait encore à l’alchimiste.Une voiture née de la fierté, de l’orgueil et d’un gros malentendu sur la notion de performance.Aujourd’hui, elle attire plus de regards qu’elle n’en a jamais eu en course.Le Minitel du Groupe B, oui. Mais un Minitel devenu collector.

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https://www.brooap.fr/articles/citroen-bx-4tc-minitel-du-groupe-b

La Citroën BX 4TC : un projet tellement français qu’il en devient touchant.

Qu’on nous pardonne le quasi-anachronisme du titre de l'article, mais on va bel et bien parler ici de celle qu’on pourrait surnommer le Minitel du Groupe B. La Citroën BX 4TC. Une idée brillante sur le papier, vendue avec la passion d’un ingénieur et la naïveté d’un service marketing en roue libre. Une voiture conçue pour dominer… qui n’a même pas eu le temps de faire illusion.

La BX 4TC Evolution restaurée, désormais pièce rare et prisée.

Quand un projet est managé par des techos’

Le projet BX 4TC démarre en 1983 dans le secret des bureaux d’études Citroën.À la tête du chantier, des ingénieurs maison qui veulent démontrer que leur suspension hydropneumatique peut survivre à n’importe quel terrain.L’idée : adapter la BX de route au règlement du Groupe B. Sauf que Citroën n’a ni la base, ni le moteur, ni le budget.Résultat : un 4 cylindres 2,1 L turbo hérité d’un bloc Simca, monté longitudinalement, avec un porte-à-faux avant digne d’un ferry.Guy Verrier, directeur de la compétition Citroën, voulait une “solution française” ; il aura surtout un casse-tête de 1 150 kg à mettre en travers.Même en interne, certains comprennent vite que la BX 4TC n’a rien d’une arme : “on bricolait une voiture de salon pour la guerre”, dira un mécano des essais.

Article Sport Auto n° 274 – les promesses d’une future 4x4 pleine d’espoir

"Tu sais, ce truc quand t’arrives en retard à une soirée… et que tes potes sont déjà beaucoup trop chauds"...

La BX 4TC obtient son homologation en novembre 1985, soit trois ans après l’arrivée de l’Audi Quattro et quelques mois avant la fin du Groupe B.
Le timing est absurde : Peugeot cartonne déjà avec la 205 T16, Lancia prépare la Delta S4, et Citroën débarque avec une berline haute sur pattes et 50 chevaux de moins.
La presse de l’époque parle d’un “concept intéressant, mais dépassé avant même le départ”.
Auto Hebdo note alors que “les BX ont fait illusion quelques kilomètres avant de rentrer dans l’anonymat des abandons”.
Au Monte-Carlo 1986, la voiture d’Andruet finit dans la neige. En Suède, elle arrache un 6e temps, et puis plus rien.
Trois rallyes, zéro podium. Fin de l’histoire.

L’avis des pilotes de l’époque

Jean-Claude Andruet reste diplomate : “Quand on saura exploiter son comportement, elle sera redoutable.”

Quelques mois plus tard, plus lucide : “La voiture était meilleure que ce qu’on en a dit, ou que ce qu’elle a pu montrer.”

En réalité, la BX 4TC était surtout un cauchemar à placer : sous-virage massif, moteur trop en avant, et hydropneumatique incontrôlable sur les bosses.
Même Philippe Wambergue, pilote d’essai maison, reconnaîtra plus tard :

“Elle ne freinait pas si mal, mais elle rebondissait comme une DS sur un rond-point.”

Le management appelé à la barre

Chez PSA, personne ne veut assumer.
Peugeot triomphe avec la 205 T16 ; Citroën, la marque sœur, ressemble à un boulet.
Guy Verrier défend son projet : “On avait la technologie, on n’a pas eu le temps.”
Mais le temps, justement, personne ne lui en laisse.
Après les échecs de 1986, le service compétition est démantelé, et la BX 4TC est rayée de la communication officielle.
Citroën ordonne la destruction des invendus : on parle de 114 voitures écrasées, parfois encore sous bâche.
Un ingénieur dira plus tard : “On a tué le patient pour qu’il n’y ait pas d’autopsie.”

Le seul remède, c’est le temps, dit Orelsan

Quarante ans plus tard, la BX 4TC fascine justement parce qu’elle s’est plantée.C’est la preuve qu’à une époque où Peugeot jouait au poker, Citroën jouait encore à l’alchimiste.Une voiture née de la fierté, de l’orgueil et d’un gros malentendu sur la notion de performance.Aujourd’hui, elle attire plus de regards qu’elle n’en a jamais eu en course.Le Minitel du Groupe B, oui. Mais un Minitel devenu collector.

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